Mais est-ce que Hank Skinner pouvait être le meurtrier ?
Trois heures après la recherche initiale sur le lieu des crimes, la police remonta jusqu’à Hank chez un voisin et l’arrêta immédiatement. Hank raconte qu’il a été emmené au commissariat, déshabillé et photographié. Il était tellement malade suite à l’absorption d’alcool et de codéine qu’il était incapable de se tenir debout pendant qu’on le photographiait; d’ailleurs, la police a du le maintenir debout afin de prendre des clichés.
Ceci apporte quelques éléments sur sa condition physique pendant la nuit où il fut accusé d’un triple homicide ; mais il y a un grand nombre d’éléments qui permettent d’émettre de sérieux doutes sur sa capacité physique, et d’ailleurs mentale, pour avoir pu commettre ces meurtres.
Après avoir été photographié, Hank a été emmené à l’hôpital pour des prélèvements sanguins. Ces analyses ont donné des résultats incroyables. Elles ont indiqué que le taux d’alcool dans le sang, à l’heure des crimes, était de 0,21 %. Ces prises de sang ont été faites six heures et demie après l’heure présumée du crime. Il a été prouvé, lors du procès, qu’il n’aurait pas pu avoir bu chez sa voisine. Elle était une ancienne alcoolique qui n’autorisait, en aucun cas, une boisson alcoolisée chez elle. Encore plus saisissant, les examens de sang ont prouvé que le taux de codéine, dans le sang de Hank, à l’heure des crimes était de 0,44 grammes pour 100 ml. Hank est dangereusement allergique à la codéine, un fait noté dans ses dossiers médicaux depuis l’âge de 17 ans (il avait 31 ans à l’époque des meurtres). Cette allergie implique un état de léthargie, de délire et d’hallucination – qui plus est, elle fait de lui quelqu’un de « mortellement malade ».
William T. Lowry, médecin expert en toxicologie, a certifié au procès que la synergie (ou effets combinés) d’un tel niveau de codéine et d’alcool dans le sang, l’aurait rendu incapable de commettre de tels actes.
Dr. Lowry indiqua que l’alcool, seul,
« aurait causé une confusion mentale, une désorientation, des étourdissements, une modification sensorielle… un équilibre instable, des phases de chancellement… ».
Un tel taux de codéine, à lui seul, aurait impliqué, pour tout individu,
« un état d’endormissement, la codéine est une drogue, c’est un sédatif et tous les centres nerveux auraient été ralentis. Donc, normalement, une personne serait plongée dans un profond sommeil. »
Dr. Lowry a pu confirmer le témoignage d’Howard Mitchell qui, à 21H30 ce soir-là (quand il est venu chercher Twila), disant que Hank aurait effectivement été dans « un état comateux » ou « inconscient et incapable de réagir à un stimuli extérieur. » Le médecin déclara qu’à minuit, Hank aurait été dans un « état léthargique ». Dans cet état, à cette heure-là, « la majorité des gens auraient été endormis, mais l’état de léthargie peut se manifester éveillé ou endormi. »
L’expert a indiqué qu’en termes de pharmacologie et de neurologie, il était « hautement improbable » que Hank ait pu infliger les blessures liées aux trois meurtres. Ils
« auraient nécessité une réflexion considérable, une grande énergie et une coordination certaine… Tout individu, dans un tel état de léthargie, aurait eu besoin de toute son énergie pour se tenir debout, marcher et de beaucoup plus pour tenter de gérer une arme – ou de donner un coup avec une telle arme. »
De plus, dans son témoignage, le Dr Lowry indique que le positionnement des empreintes de main trouvées sur le lieu du crime, identifiées comme étant celles de Hank, seraient cohérentes avec le comportement de quelqu’un titubant et souffrant des effets d’une intoxication ayant entraîné un état de léthargie.
« …dans un état de léthargie, une personne aurait besoin de s’appuyer sur quelque chose afin de se tenir debout ; mais le résultat n’en est pas garanti pour autant, et parfois, cette personne aurait besoin d’un peu plus d’assistance… en s’agrippant à des objets pour se relever. »
Par ailleurs, il ajouta qu’il était tout à fait logique, dans cette situation, qu’un individu, dans un tel état, se trouve taché avec une accumulation de sang d’autres individus se trouvant sur son chemin pendant qu’il aurait tenté de se déplacer.
« Dans un environnement tel que vous le décrivez (le lieu du crime), il aurait fallu manœuvrer sérieusement, en se déplaçant, afin ne pas se tacher avec le sang d’une personne ou d’une autre. Une personne dans un état de léthargie se déplace… de façon saccadée et dans des directions différentes. »
Ces deux dépositions confirment les affirmations de Hank concernant l’accumulation de sang et les empreintes qu’il a laissées lorsqu’il a titubé pour sortir de la maison.
Toutefois, cela ne se termine pas ainsi. En plus de ces éléments, Hank était, en terme de pharmacologie, en état d’incapacité, il y a d’autres preuves irréfutables pour suggérer que Hank ne pouvait pas être le meurtrier. Dr Elizabeth Peacock, l’expert médical de l’État, a certifié que les coups portés à la tête de Twila étaient d’une telle force que des éclats d’os ont été retrouvés jusqu’au centre de son cerveau. L’os du crâne de Twila était anormalement épais.
« Chez certains individus, cela rend la matière osseuse plus fragile et spongieuse ; chez d’autres individus, cela rend l’os plus dense et impénétrable, beaucoup plus résistant qu’à l’ordinaire, et c’était le cas pour Twila. »
Le Dr Peacock indiqua que le meurtrier devait posséder une grande force et de la dextérité pour avoir pu manier une arme avec autant de force et provoquer de telles lésions.
Par ailleurs, le médecin légiste trouva des éléments qui indiquaient que Twila avait été étranglée avant sa mort, avec des mains suffisamment fortes pour laisser des traces sur la peau et causer une fracture osseuse. Clairement, le meurtrier de Twila Busby était un homme de grande force physique. En comparaison, Hank Skinner a une main handicapée suite à une blessure liée à l’utilisation d’une scie. L’accident a causé une perte de chair dans la palme de sa main et, en conséquence, il a subi des séquelles de sensibilité nerveuse sur cette zone ainsi qu’une perte de chair équivalent à 50% de sa paume. Hank est un homme de petite taille, 1,79 m pour 64 kilos. Entre son intoxication et sa main handicapée, il était dans l’incapacité physique de commettre ces crimes.
Ceci aurait dû, sans l’ombre d’un doute, jeter une zone d’ombre sur les affirmations de l’accusation quant à la culpabilité de Hank Skinner. De ses propres mots :
« L’expert médical a démontré, devant la Cour, la méthode de strangulation sur Twila Busby. Cette strangulation a été faite avec les deux mains à plat, les pouces l’un sur l’autre, les doigts de part et d’autre de la nuque. La position 0 ‘classique’ pour une strangulation. Je n’aurai jamais pu y parvenir. »
En résumé, Hank le dit très bien :
« Le fils le plus âgé, Scooter, avait 22 ans, mesurait 2 m et pesait aux alentours de 120 kilos, il était en parfaite santé. Je suis un homme menu, 1,79m pour 64 kilos et, à l’heure des crimes, j’avais un taux d’alcoolémie de 0,24 grammes dans le sang, ce qui est le double d’un taux d’ivresse. Ajouter à cela, 44 grammes par 100ml de sang pour la codéine et la synergie des deux éléments, ajouter à cela mon allergie à la codéine… Considérez la force requise pour infliger de tels coups. Les coups de couteau sur les garçons n’étaient qu’à quelques centimètres les uns des autres, groupés. Pensez à la précision, à la dextérité requise pour aboutir à de telles blessures sur une personne, deux d’entre elles étaient des cibles en mouvement, je présume. Prenez tout cela en considération et dites-moi que je suis celui qui a tué ces trois personnes. Non seulement, c’est tiré par les cheveux, mais c’est dément et impossible. »
L’assassin de Randy Busby – Une question de taille
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